Annexe 1 : Les oligo-éléments et la vie


Définition


Si la vie n existe pas sans les vitamines, les protides, les lipides, les glucides ou l'eau, elle n existe pas non plus sans les éléments minéraux, et de la même façon , les concentrations physiologiques peuvent être très faibles.

L'homme vit en symbiose avec sa planète et le corps humain contient tous les éléments de la classification périodique disponibles dans son environnement. Certains de ces éléments ont été appelés essentiels, car l'absence était incompatible avec la vie et une carence se traduirait par une pathologie propre (Dans notre civilisation occidentale, ces carences ne sont que très rarement observées, et il faudrait plutôt parler de sub-carences).A cette notion de carence s ajoutait le fait que l'on pouvait corriger la pathologie observée par l'apport de l'élément ou des éléments manquants. Les oligo éléments essentiels sont donc définis par ces deux notions : pathologie carentielle corrigée par une supplémentation.

Il faut donc :
mettre la carence en évidence -----------> dosage
pouvoir la provoquer ------------------------> expérimentation
pouvoir la corriger --------------------------> supplémentation

Cette définition limite au rôle d oligo élément essentiel ceux qui sont accessibles au dosage ou à l'expérimentation. La mise en évidence de carences reste dépendante des possibilités de dosage. Celles-ci évoluent : certains éléments ont été difficiles à doser, d autres les restent. De la même façon, il est des expérimentations difficiles lorsque les éléments sont largement distribués dans la nature, ce qui fait que la carence naturelle en l'un de ces éléments n existera jamais naturellement et sera difficile à provoquer expérimentalement. Ils ne pourront donc jamais répondre à la définition des oligo éléments essentiels, et c est la raison pour laquelle nous aimerions substituer à la définition traditionnelle des oligo-éléments, une autre définition fondée sur des critères de régulation. Il est en effet merveilleux de constater que l'organisme sait sélectionner les élém ents dont il a besoin, les réguler, les concentrer, et ce à des doses parfois infimes.

Un oligo-élément essentiel serait donc pour nous un élément constamment présent dans l'organisme et régulé par celui-ci.



Classification des oligos-éléments : éléments traces et ultra-traces

La classification des oligo éléments dans les milieux biologiques repose sur leur concentration et l'on peut distinguer :

- les éléments essentiels majeurs (Fe, Ca, Mg, Zn, Cu, Si,) et
- les éléments essentiels mineurs ou ultra-traces (Se, V, Mo, Mn, Co, Ni, Cr, I)
TABLEAU



Peut-on prévoir le rôle des oligo-éléments essentiels
Tableau périodiques des éléments

He Li Be                     B C N O F Ne
Ne Na Mg                     Al Si P S Cl Ar
Ar K Ca Sc Ti V Cr Mn Fe Co Ni Cu Zn Ga Ge As Se Br Kr
Kr Rb Sr Y Zr Nb Mo Tc Ru Rh Pd Ag Cd In Sn Sb Te I Xe
Xe Cs Ba La Hf Ta W Re Os Ir Pt Au Hg Tl Pb Bi Po ?At Rn
Rn Fr Ra Ac Ku                            

Une confusion de langage qui définit la vie comme étant la vie organique, fait penser que seule la chimie organique est impliquée dans les phénomènes essentiels. Il s'ensuit que le carbone, l'oxygène, l'azote, l'hydrogène et le soufre deviennent les principaux éléments à considérer. Pourtant, on admet que le sodium, le potassium, le magnésium, le calcium et le chlore jouent des rôles clés dans les processus biologiques.

Ceci semble limiter singulièrement le nombre d'éléments participant à des processus vitaux et tout un chacun sait que le fer, mais aussi le cobalt de la vitamine B12 sont essentiels.
Chaque élément a des propriétés chimiques spécifiques qui définissent son comportement et ce sont ces propriétés que l'élément exprimera dans la chimie du vivant dans un phénomène biologique, son comportement sera strictement limité par ses propriétés chimiques. Ceci parait évident et pourtant, l'on entend souvent des discours qui prêtent à certains éléments des comportements absolument impossibles puisqu ils ne répondent pas aux propriétés chimiques de cet élément.
On peut alors reprendre le tableau périodique du point de vue des rôles et de l'importance des différents éléments.

Les colonnes 1 et 2 contiennent les alcalins et les alcalino-terreux. Le sodium, le potassium, le magnésium et le calcium ont des rôles multiples puisqu'ils sont impliqués dans les échanges membranaires, les transmissions de l'influx nerveux, la formation des os et, dans le cas du magnésium et du calcium, ils sont souvent prescrits.

Les colonnes 14, 15, 16 et 17 contiennent des éléments tels que le silicium (formation des os), le chlore (équilibre intra/extra-cellulaire) le brome (qui interviendrait également dans les échanges membranaires) et l'iode (thyroide) qui ont un rôle essentiel mais se différencient déjà par leur concentration puisque le plasma contient un atome de brome pour 1700 atomes de chlore.
Le sélénium est un élément dont on parle beaucoup ; il est constitutif de la gluthation-peroxydase (action anti- cancéreuse) et, par conséquent, intervient dans les processus d'élimination des peroxydes. La concentration normale dans le plasma est d environ 90 microgrammes par litre, ce qui représente 8 atomes de sélénium pour 1 million d'atomes de chlore. On comprend alors qu on parle d'ultratrace et il est remarquable de constater que l'organisme a le pouvoir de réguler la concentration d'un élément à ce niveau. Le dysfonctionnement de cette régulation peut conduire à un affaiblissement important des défenses.

Une série d'éléments très importants commence en colonne 5 avec le vanadium jusqu à la colonne 12, le zinc, et, à part ce dernier, ces éléments sont appelés éléments de transition.

Ils ont des rôles essentiels :

d'une part ils sont capables d'organiser la matière en formant des complexes avec des molécules biologiques, et la géométrie qu'ils imposent à cette matière est caractéristique de l'élément et permettra le phénomène de reconnaissance moléculaire. En d'autres termes, c'est grâce à cette propriété qu'une enzyme sera reconnue sur le site actif, ou bien aura la conformation adéquate pour réagir avec un substrat donné.

d'autre part, la propriété de ces mêmes éléments de changer de degré d'oxydation (le fer ++ est essentiel, alors que le fer +++ ne l'est pas). Ceci signifie qu ils sont capables de donner ou de capter des électrons, ce qui va permettre un échange d'énergie exactement approprié au processus biologique et à une chimie du vivant qui se réalise à température constante.

Une conséquence extrêmement importante des deux propriétés précédentes est l'impossibilité pour l'organisme de réaliser une réaction biologique en utilisant un élément de transition non approprié. Ceci veut dire qu une enzyme fonctionnant avec du zinc ou du manganèse ne peut pas, en cas de carence, être remplacée par une enzyme au chrome ou au nickel. Cette notion d' impossibilité de substitution contient deux idées fortes :

- la nécessité de la présence de tous les éléments nécessaires A part le fer, tous les éléments de transition sont à l'état de trace ou d'ultratrace et cependant, la vie n est pas possible sans leur présence simultanée aux concentrations requises.

- la possibilité, en cas d'intoxication par des éléments se trouvant sous la première série de transition, d'erreur de l'organisme qui construira, avec du rhodium ou du niobium par exemple, des entités qui n'auront ni la géométrie, ni les propriétés énergétiques pour participer à la place du cobalt ou du vanadium à des processus biologiques.



Formes et rôles des oligos-éléments essentiels

a. Formes
Les oligo-éléments existent dans l'organisme sous trois formes :


FORMES
Electrolytes :
ils participent alors au maintien de la pression osmotique

Transportés :
ils sont alors fixés sur une protéine qui va les déposer dans les tissus où ils seront utilisés (synthèse organique), stockés ou éliminés

Partie intégrante d'une protéine :
95 % de la concentration plasmatique d'un élément

b. Modes d action des oligo-éléments essentiels
Les oligo-éléments jouent un rôle indispensable chez l'homme ou les mammifères en assumant les fonctions suivantes :


MODE D'ACTION
Cofacteur enzymatique :
cette fonction extrêmement fréquente peut s'exprimer de façon différente, le métal peut suivant l'enzyme être catalytique et régulateur, structurel uniquement, structurel et régulateur

Stabilisateur de structure :
le métal va donner sa forme à des protéines, des acides nucléiques, des membranes leur permettant des liaisons spécifiques en mettant en évidence certains sites et en en masquant d'autres

Hormones :
le métal peut être un composant de l'hormone. C'est le cas des hormones thyroidiennes. Les métaux peuvent jouer un rôle indirect dans les fonctions hormonales en activant certaines fonctions ou en permettant certaines liaisons

c. Exemples de fonctions élémentaires dans l'organisme humain
(selon J.D. KRUSE-JARRE 9-10)


Exemples
Calcium activateur enzymatique, électrolyte
Phosphore acide nucléique
Soufre protéine (S-H)
Potassium activateur enzymatique, électrolyte
Sodium balance eau-électrolyte
Magnésium activateur enzymatique, électrolyte
Fer metallo-enzyme, activateur enzymatique
Zinc metallo-enzyme, activateur enzymatique
Cuivre metallo-enzyme
Iode hormones thyroidiennes
Fluor inhibition enzymatique (glycolyse)
Manganèse metallo-enzyme, activateur enzymatique
Molybdène metallo-enzyme
Vanadium réaction d'oxydoréduction
Sélénium enzyme protéique (glutathion peroxydase)
Nickel metallo-enzyme
Cobalt metallo-enzyme, activateur enzymatique, Vit. B12

Les oligo-éléments sont fortement impliqués dans les mécanismes enzymatiques. Cette implication est variable suivant les éléments, on connait par exemple : 200 enzymes contenant du zinc, 4 contenant du molybdène et une seule contenant du sélénium (à ce jour).


Métabolisme des oligos-éléments

a. Schéma général



b. Absorption

• Transport

Les oligo-éléments proviennent exclusivement des apports alimentaires. Le passage des oligo-éléments du tube digestif dans le milieu intérieur peut se faire de trois façon différentes:

Transport passif : (exemple sodium ou potassium)
Les éléments traversent la muqueuse digestive sans dépense d énergie
Transport facilité :
La muqueuse digestive favorise le passage de ces éléments sans l intervention des protéines en créant des « tunnels »
Transport actif :
Ce passage nécessite la fixation de l élément sur une protéine, parfois la modification de son degré d oxydation et toujours l utilisation d énergie (ATP)

Ce passage va se faire en deux temps :

capture par un ligand
prise en charge par un transporteur.

ELEMENT LIEU D'ABSORPTION LIGAND TRANSPORT
Co Estomac Facteur intrinsèque
Transcobalamine
Complexation avec des groupements
pyroles à la cobalamine
Cr Intestin grêle Oxygène - Azote Complexxation avec la transferrine
(liaison 3+ 5°) Facteur de
tolérance glucidique
Cu Duodénum - Jéjunum Céruléoplasmine Liaison bivalente
F Estomac - intestin   Composé fluoré à faible poids
moléculaire
I Toute muqueuse    
Mo   Flavines liaison pentavalente avec des
protéines non connues
Mn Duodénum - iléon Trans-manganine complexé avec des acides nucléiques
Se Iléon distal Acides aminés Séléno-méthionine
Si   Acide hyaluronique Liaion SI-O-Si Si-C
Zn Duodénum - Jéjunum Zn-protéine Oxyde de zinc - Sulfate de Zinc
Zn-amino-acide


Ce tableau montre que les oligo-éléments essentiels sont absorbés à des niveaux spécifiques du tube digestif et que la voie perlinguale parfois préconisée ne se justifie pas car il faut que l élément rencontre son transporteur pour une pénétration optimale.

• Remarques :
Les oligo-éléments sont apportés par l alimentation en fonction des besoins. Les conditions préalables à ces apports sont une quantité suffisante et adaptée de nourriture et des facultés digestives d absorption normales. Ces conditions ne sont pas toujours réunies.
Les possibilités d absorption sont souvent limitées car facilement saturés et le plus souvent l organisme est incapable de pallier rapidement à des pertes importantes en oligo-éléments essentiels. Les échanges quotidiens sont le plus souvent faibles au regard des quantités utilisées par l organisme.

Ceci explique bien que l organisme éprouve de grandes difficultés à compenser des pertes massives comme celles que l on peut rencontrer à l occasion d hémorragies chroniques par exemple.

On comprend l intérêt qu il y a de se préoccuper des apports oligo-élémentaires lorsque l alimentation est artificielle (rations de survie, alimentation parentérale).

- Le passage à travers la muqueuse digestive nécessite bien évidemment une intégrité du tube digestif et un fonctionnement digestif normal. C est ainsi que toute modification de la vitesse de transit (exemple : diarrhée) s accompagnera de perturbations de l absorption des oligo-éléments.

- Certains éléments ne sont absorbés qu à des niveaux spécifiques du tube digestif.
Exemple : le fer est absorbé au niveau du duodénum.

- La notion d intégrité de la fonction digestive est particulièrement importante et devra être présente à l esprit lors de l interprétation des dosages. On voit qu il est important de connaitre, pour apprécier l état d un élément, celui des autres éléments, et en particulier de ceux qui lui sont associés, pour pouvoir distinguer une carence vraie de carences dues à un défaut de la fonction digestive. A ce moment, le diagnostic différentiel se posera entre déficit d apport et défaut d absorption.

• Facteurs influençant l'absorption digestive des oligo-éléments essentiels
Biodisponibilité :
Ce terme précise l'importance de la forme sous laquelle les oligo-éléments sont apportés, en effet, certaines formes ne sont pas assimilables par l'organisme. La forme utilisable du chrome est le chrome trivalent (Cr +++), le chrome hexavalent est toxique.
Le fer bivalent a une biodisponibilité très supérieure à celle du fer trivalent (Fe+++).

Environnement élémentaire :
Certains éléments nécessitent la participation d'autres éléments pour une absorption digestive optimale.
Le fer nécessite la coparticipation du nickel, du molybdène et du cuivre.

Produits diminuant l'absorption intestinale des oligo-éléments (selon 8,9)

Produits Eléments perturbés
Phosphates
Phytates (+Ca)
Caséine
Fibres végétales
Particules absorbantes (ex.:argiles)
Zn, Cu,Fe
Zn, Mg, Cu, Mn
Zn
Zn, Ca

Produits favorisant l'absorption des oligo-éléments

Produits Eléments perturbés
Acides aminés
Acides carboxyliques
Histidine, Cistéine
Citrate, Malate, Lactates, Piccolinate

• La concentration des oligo-éléments : saturation ou hyperstimulation
L'absorption des oligo-éléments se fait essentiellement par des processus actifs qui sont saturables par des quantités trop importantes d'un élément. Ces mécanismes sont également hypertrophiables comme tout mécanisme biologique, par des sollicitations trop importantes et surtout trop fréquentes. On peut supposer raisonnablement que comme souvent l'hypertrophie d'une fonction va s'accompagner de l'hypotrophie de certaines autres selon un mode compétitif. Ceci implique que l environnement le plus favorable à l absorption devra être équilibré, c est à dire que chacun des éléments devra se présenter dans de bonnes proportions. De plus, la présence de certains produits (phytates...) va favoriser, ou au contraire s opposer à l absorption des oligo-éléments.

• Equilibre final
S'il existe une adaptation physiologique permettant à l'organisme de privilégier l'absorption d'un élément par rapport aux autres, ces mécanismes d'adaptation resteront dépendants non seulement des habitudes ou des possibilités alimentaires d'un sujet, mais également de ses possibilités génétiques (de même qu'il existe une inégalité génétique devant les glucides, les lipides, .... il doit exister des inégalités génétiques dans les possibilités de chacun de réguler ses oligo-éléments), de ses habitudes toxiques ou médicamenteuses (diurétiques ou complexants, par exemple).

De ce qui précède, on peut dire que chaque individu va stabiliser ses équilibres oligo-élémentaires à un niveau personnel en fonction de ses habitudes et de son environnement, équilibre que l on peut résumer ainsi :

schéma 2

c. Milieux extra-cellulaires

Le milieu extra-cellulaire comprend le milieu circulant et le milieu interstitiel. Le milieu circulant est particulièrement intéressant car il comprend une importante part cellulaire : les globules rouges, milieu facilement accessible à l investigation, et dont l étude pourra nous donner une idée du comportement intra-cellulaire.

Dans les milieux extra-cellulaires, les éléments traces circulent le plus souvent liés à des protéines dites : protéines de transport (la protéine la plus utilisée est l albumine).

Certains éléments nécessitent cependant des protéines de transport propres.
Exemple : l apoferritine pour le fer.

Le but de ce transport est de transférer des éléments dans le milieu intra-cellulaire ou dans les organes de stockage.
Le milieu circulant possède une deuxième fonction qui est de véhiculer les protéines synthétisées par les milieux intra-cellulaires vers leurs cibles.
Exemple : le cuivre dans la céruléoplasmine.

La dernière fonction du milieu extra-cellulaire est de véhiculer les éléments vers les lieux d élimination à la demande des mécanismes de régulation.

> Sommaire
> Annexe 2 : Fondements de la cure